C’était une de ces soirées calmes de 2046, dans mon bureau-atelier baigné par la lumière tamisée d’une lampe à plasma bioluminescent. Les murs étaient tapissés de souvenirs : des fragments de ma vie, des objets trouvés et des carnets griffonnés. Alors que je fouillais dans un tiroir oublié, mes doigts tombèrent sur un vieux journal jauni par le temps. Une coupure de presse y était soigneusement glissée : l’annonce du décès de Jean-Pierre.

Je m’étais figé, le souffle suspendu. C’était il y a si longtemps. Je me souvenais de son enterrement comme si c’était hier. Ce n’était pas une cérémonie triste, non. Jean-Pierre n’aurait jamais voulu ça. C’était un rassemblement joyeux, presque festif, où chacun racontait « sa » version de Jean-Pierre, entre rires et anecdotes rocambolesques. Et sur sa tombe, gravée dans la pierre, une épitaphe qui m’avait marqué à jamais :

« Marchand de vent, il a rejoint l’invisible qu’il savait si bien vendre. »

Portrait d’un conteur né

Jean-Pierre, c’était d’abord une silhouette. Svelte, toujours en mouvement, il ne se déplaçait qu’à pied, comme s’il voulait s’imprégner des rues qu’il arpentait. Son uniforme ? Un blouson MA-1 Bomber Jacket, ce classique des aviateurs qu’il portait avec une fierté presque nostalgique. Le vert olive du tissu était usé par le temps, les bords côtelés légèrement effilochés, et la doublure orange vif semblait crier son envie d’être vue. Sous ce blouson, une chemise au col ouvert, une cravate à moitié nouée, comme un clin d’œil moqueur aux conventions. Il avait rêvé d’être pilote de chasse, mais sa vue l’avait trahi. Alors, il avait pris son envol ailleurs, dans le ciel de la vente.

Jean-Pierre carburait à la Camel sans filtre et à l’expresso serré. De temps à autre, une Kronenbourg venait célébrer une victoire, une signature, un contrat décroché au prix d’une bataille acharnée. Mais ce qui le définissait vraiment, c’était sa voix. Une voix rocailleuse, vibrante, qui transformait chaque conversation en spectacle. Jean-Pierre aimait raconter des histoires. Il ne le savait pas, mais il était un conteur né, un magicien des mots.

L’école de la rue et la philosophie du « one shot »

Jean-Pierre avait quitté l’école tôt, très tôt. « J’avais pas la patience pour les bancs, gamin », me disait-il souvent. Et pourtant, il avait appris une chose essentielle : l’art d’écouter et de comprendre les gens. À travers mille petits boulots, il avait trouvé sa voie dans la vente. Mais pas n’importe quelle vente : celle du « one shot ».

Le « one shot », c’est l’art de convaincre en une seule rencontre, une seule interaction. Pas de seconde chance, pas de retour en arrière. « Quand tu fais du porte-à-porte, gamin, t’as pas le temps de réfléchir. Soit tu les embarques tout de suite, soit tu repars bredouille. » Jean-Pierre me répétait ça en boucle, cigarette au bec, en martelant le trottoir à mes côtés.

Sa méthode ? Elle tenait en trois mots : observation, connexion, conviction.

  1. Observation : Avant même de frapper à une porte, il scrutait les moindres détails. Le jardin, la voiture, les rideaux. « Tout parle, gamin. Regarde bien, et tu sauras à qui t’as affaire avant même qu’ils ouvrent. »
  2. Connexion : Dès que la porte s’ouvrait, il lançait une phrase d’accroche, toujours adaptée à ce qu’il avait observé. Un compliment sur le chien, une blague sur la météo, une remarque sur le quartier. « Faut qu’ils t’aiment en dix secondes, sinon t’es mort. »
  3. Conviction : Une fois la connexion établie, il déroulait son discours avec une énergie contagieuse. « Tu vends pas un produit, tu vends un rêve, une solution, une émotion. Et pour ça, faut y croire toi-même. »

Jean-Pierre vendait de la publicité. Du vent, comme il aimait le dire. Mais pour lui, ce n’était pas une insulte. Bien au contraire. « Vendre du vent, gamin, c’est vendre l’invisible. Ça demande du talent. Quand tu vends une voiture, les gens peuvent la toucher, la voir. Mais une idée ? Un concept ? Là, c’est ton charisme qui fait tout. »

Ce que Jean-Pierre m’a appris sur le recrutement

Avec le recul, je réalise à quel point les leçons de Jean-Pierre dépassaient le cadre de la vente. Elles ont façonné ma manière de voir le recrutement. Car au fond, vendre et recruter, c’est la même chose : c’est convaincre des êtres humains de croire en quelque chose. Une opportunité, un projet, une vision.

  1. Observer : Comme Jean-Pierre scrutait les jardins et les rideaux, un recruteur doit lire entre les lignes d’un CV, observer les détails d’un entretien, capter les non-dits.
  2. Connecter : Que ce soit avec un candidat ou un client, la connexion humaine est la clé. Trouver ce terrain commun, cette étincelle qui ouvre les portes.
  3. Convaincre : Enfin, il faut croire en ce que l’on propose. Que ce soit un poste ou une mission, il faut transmettre cette conviction avec authentité.

Jean-Pierre m’a appris que tout est une question d’énergie. « Si t’es éteint, gamin, ils le sentiront. Mais si t’es allumé, si t’es vrai, ils te suivront. » Et cette vérité, je l’ai emportée avec moi, bien au-delà des trottoirs où nous marchions ensemble.

L’héritage d’un marchand de vent

Je suis resté longtemps à contempler cette coupure de journal, ce souvenir d’un autre temps. Jean-Pierre n’était pas qu’un vendeur. Il était un passeur. Un homme qui semait des histoires et des leçons sur son chemin.

Aujourd’hui, alors que je me tiens à la croisée des chemins entre le passé et le futur, je repense souvent à lui. À son blouson usé, à sa voix rauque, à ses anecdotes. Il m’a appris à marcher droit dans un monde de doutes, à transformer les refus en opportunités, et à voir la beauté dans l’invisible.

Et moi, je continue de transmettre ce qu’il m’a donné, à ma manière, dans l’univers du recrutement. Car au fond, que l’on vende un espace publicitaire ou une vision du futur, tout commence par une histoire. Et Jean-Pierre, lui, savait les raconter comme personne.

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